Constat d’échec!!!!!
En plein recul du gouvernement sur l’interdiction des néonicotinoïdes tueurs d’abeilles, la Préfecture de la Corrèze vient de valider sans surprise la charte départementale agricole sur les pesticides.
Pour rappel, notre association, née il y a 15 ans, défend depuis 10 ans le principe et l’intérêt des chartes dès lors que celles-ci sont menées dans un véritable esprit de concertation, de dialogue et de volonté d’aller de l’avant. Nous avons été précurseurs dans ce domaine au point que même le Président de la République et plusieurs ministres successifs ont salué notre travail de longue haleine menée en partenariat avec les arboriculteurs du Limousin. Même si tout n’a pas été facile et que des difficultés persistent, l’exemplarité de la Charte arboricole du Limousin dans sa méthode a inspiré sans conteste le Législateur dans l’article 83 de la Loi EGALIM qui étend et impose ainsi le concept des chartes dans tous les départements Français.
Dans le cas présent, la Chambre d’Agriculture de la Corrèze a élaborée seule ce document. Plus grave encore, elle nous a refusé la concertation que nous avions réclamée.
De fait, nous ne reconnaissons pas cette charte qui est pour nous sans aucune valeur, n’apportant la moindre protection des riverains vis à vis des épandages de pesticides. Nous nous en expliquons dans le communiqué de presse ci-dessous cosignés par :
- ALLASSAC ONGF
- Alerte des Médecins sur Les Pesticides
- Mouvement Citoyens « Nous voulons des coquelicots d’Allassac
Communiqué de Presse du 08/10/2020
PESTICIDES
Charte départementale agricole de la Corrèze « Bien vivre ensemble » = Constat d’échec.
Alors que la Préfecture de la Corrèze vient de valider la charte départementale agricole pour le « Bien vivre ensemble » , les associations Allassac ONGF et Alerte des Médecins sur Les Pesticides, à la pointe de la lutte contre les dangers des pesticides, en plein recul du gouvernement sur les néonicotinoïdes tueurs d’abeilles, ne pouvaient rester sans apporter leur point de vue sur cette « charte pesticides» dont l’obligation légale résulte de l’article 83 de la loi EGALIM .
David Marmonier, président d’Allassac ONGF, précise le point de vue de l’association: « Nous ne reconnaissons pas cette charte départementale, qui a été faite selon un modèle « clés en main » sans aucune concertation avec les riverains qui sont pourtant les premiers concernés. Il y a plusieurs mois nous avions sollicité le Pdt de la Chambre d’Agriculture pour lui faire part de notre volonté de concertation et lui présenter nos attentes et propositions, notamment vis-à-vis de l’information des riverains, promeneurs et autres usagers des zones d’épandages, exposés à la dérive des pesticides. Nous ne pouvons que regretter que l’expression « nul n’est prophète en son pays » se confirme une nouvelle fois puisque notre demande est restée lettre morte alors même que, sur le plan national, la mission interministérielle de l’inspection générale des affaires sociales qui nous a auditionnés, reprend nos remarques et recommande que par le biais des chartes départementales, les pratiques agricoles soient adaptées aux parcelles jouxtant les habitations et ce jusqu’à une distance qui devrait être de 50 m au minimum, à l’instar de la distance prévue par l’instruction DGAL pour l’arboriculture! Les mesures générales proposées avec des distances d’épandage ridicules de 3 ou 5 mètres constituent donc un recul par rapport aux recommandations des experts. Cette nouvelle Charte départementale crée de l’incertitude et de la confusion : on ne sait pas vraiment ce que devient la charte arboricole signée en 2017, reléguée en annexe et rebaptisée « convention ». A-t-elle une valeur réglementaire et comment peut-on faire coexister deux chartes complètement opposées dans leurs ambitions et leur contenu ?
Pour le porte-parole d’Allassac ONGF, c’est le sentiment de « l’arroseur arrosé ». Fabrice Micouraud s’explique : « Après 15 années de tensions ponctuées de procès et d’évènements parfois proches du « fait divers », nous avons œuvré en concertation étroite et sincère avec les arboriculteurs du Limousin pour mettre en place une charte qui se voulait évolutive et ambitieuse au regard de la législation alors quasi-inexistante en matière de protection des riverains. Ce travail de concertation exemplaire, entre riverains et arboriculteurs, qui a grandement participé à l’évolution législative conduisant à la reconnaissance des riverains comme « public vulnérable à l’exposition aux pesticides » mais aussi à l’obligation des chartes départementales, a été salué par plusieurs ministres successifs. Cela nous a conduits à participer durant plusieurs mois à un groupe de travail interministériel visant à définir les décrets d’application et nouveaux textes encadrant les règles d’usages des pesticides. Nous avons aujourd’hui le sentiment d’avoir été manipulés pour faciliter l’acceptation de chartes départementales totalement vidées de leur substance. Même le principe de l’alerte préalable aux traitements, que nous avons mis en place sur le terrain avec l’application Phyto’alerte et qui constitue une véritable innovation 100% Corrézienne, saluée par des responsables ministériels et de très nombreux médias nationaux, a été volontairement occultée dans cette charte départementale. Si ce n’est pas une réelle surprise, c’est en tout cas une profonde déception pour les riverains qui espéraient sincèrement une véritable concertation pour un « mieux vivre ensemble. »
Les médecins de l’association Alerte des Médecins sur Les Pesticides, partenaires historiques d’Allassac ONGF et signataires de la charte arboricole du Limousin, par la voix de leur Président, le Docteur Pierre Michel PERINAUD, apportent leur analyse sur les chartes départementales :
« Nous avons également participé au groupe de travail interministériel, et avons largement argumenté une analyse qui pour l’essentiel repose sur la prise en compte de la dangerosité des produits utilisés pour les agriculteurs, mais aussi leurs voisins et les écosystèmes. Nous attendions donc avec intérêt le décret et l’arrêté du 27 décembre 2019 relatifs aux mesures de protection des personnes lors de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques à proximité des zones d’habitation. Hélas s’ils définissent un cadre, les chartes, celles-ci ne sont élaborées que par les seules organisations syndicales représentatives ou les chambres d’agriculture. Riverains et association de défense de l’environnement sont tout au plus consultés. Quant aux mesures de protection elles auraient dû prendre en compte les études montrant la dérive des produits bien au-delà des 10 mètres, la contamination des populations exposées, et surtout les pathologies liées à cette contamination et mises en évidence par des études épidémiologiques. Comble de l’ironie, la distance de 20 mètres concédée aux produits les plus dangereux ne concerne que les CMR 1, déjà interdits ! L’Anses, à laquelle tout le monde fait mine de se référer, concédait pourtant dans son avis du 14 juin 2019 que des distances de sécurité devaient être « supérieures par mesure de précaution en particulier pour les produits classés cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction» à celles déterminées par l’évaluation des risques. Enfin, les mesures dérogatoires aux délais de réentrée (pendant lesquels les travailleurs ne peuvent revenir dans les parcelles traitées) sont tout simplement inacceptables et mettent un peu plus en danger les travailleurs exposés.
Pour l’ensemble de ces raisons l’AMLP n’attendait rien de cette charte départementale et a, pour ce qui la concerne, déposé un recours en Conseil d’État contre ce décret. »
Au cours de ces deux dernières années, le mouvement citoyen « nous voulons des coquelicots » a recueilli 1 136 000 signatures demandant la fin des pesticides de synthèse. Pour Paul est Isabelle Mina, en charge de l’un des nombreux collectifs sur la Corrèze, présent chaque 1er vendredi du mois sur le marché d’Allassac ; « il y a une véritable dichotomie entre les attentes des citoyens en matière de Santé / Environnement et les mesures qui se mettent en place. Cela se traduit par l’autorisation dérogatoire faite aux betteraviers dans le recours aux néonocotinoïdes, ce qui revient pour nous à ouvrir une véritable boite de Pandore dans laquelle vont s’engouffrer céréaliers et autres mais aussi dans ces chartes départementales totalement vides et inutiles qui se contentent de dire que les utilisateurs de pesticides s’engagent à respecter la réglementation ! Notre mouvement citoyen « nous voulons des coquelicots » poursuit, malgré tout, ses actions en faveur de la santé, de l’environnement et des agriculteurs contre les Pesticides. Notre mouvement se poursuit sous le titre » Nous voulons des paysans » . Nous souhaitons qu’un plan de sortie de l’agriculture industrielle soit mis en place. Ce nouveau contrat social permettra de produire des aliments de qualité pour TOUS , sans pesticides, et de les vendre dans des circuits stables et rémunérateurs ».
Les associations Allassac ONGF et Alerte des Médecins sur les Pesticides, par leur travail avec les arboriculteurs du Limousin, ont bien conscience d’avoir en partie inspiré au Législateur ce principe des chartes départementales et , durant de longs mois, ont tout mis en œuvre pour croire en la possible efficacité de ce dispositif visant initialement à un « bien vivre ensemble ».
Pour autant, aujourd’hui, sur la base de la charte départementale de la Corrèze et de la majorité des chartes en France, ces associations impliquées de longue date dans la mise en œuvre d’actions visant à la protection de la santé et de l’environnement face aux dangers des pesticides dressent un constat d’échec des chartes départementales.
Contacts presse : Allassac ONGF : 06.50.22.42.62 et 06.06.42.08.62 AMLP : 06.31.23.66.72